Accés rapides
Accès
rapide
Le mûrier : l’arbre d’or
Diffusion des techniques de sériciculture dans le monde
L’art de la soie est né en Chine environ 2700 avant notre ère. Ce pays a gardé secrète la technique de fabrication pendant deux millénaires pour garder le monopole du commerce des soieries qui transitaient par la Route de la Soie jusqu’en Europe. La sériciculture finit cependant par migrer progressivement en Corée, puis au Tibet vers 400 avant notre ère, et enfin au Japon et en Inde.
Ce n’est qu’au VIe siècle que les secrets de fabrication parviennent jusqu’aux bords de la Méditerranée. La diffusion sera ensuite progressive dans tout le bassin méditerranéen en même temps que l’islam
Développement de la sériciculture en France
En France, le tissage de la soie a précédé l’élevage du ver : le tissage à partir de fil importé est répertorié au Xième siècle.
Les premiers mûriers seront plantés en Provence en 1266 à la suite de l’expédition de Charles d’Anjou à Naples. À peu près à la même époque, dans les Pyrénées, les mûriers seront introduits par les maures, via l’Espagne.
’élevage de ver à soie et la fabrication de fil de soie semble avoir existé dans les Cévennes dès la fin du XIIIème siècle. Un acte notarié de 1296 cite l’existence d’un certain Raymond de Gaussargues d’Anduze, « trahandier » c’est à dire tireur de soie. Le développement de cette activité va être très irrégulier en fonction des aléas politiques (guerres, révolution, intérêt des rois en place…) mais aussi des subventions données par l’état.
En France, au XVème siècle, les étoffes de soie sont très recherchées mais elles proviennent principalement d’Italie, ce qui préoccupe beaucoup Louis XI (1423-1483) au point que par l’ordonnance du 23 novembre 1466 il tente de développer une production nationale à Lyon en y implantant une manufacture royale ; mais l’indifférence, voire l’hostilité des magistrats de cette ville, pousse le souverain à l’implanter à Tours.
Poursuivant son idée, Louis XI incite les ouvriers étrangers, italiens surtout, à venir travailler à Tours, qui s’érige dès lors en capitale de la soie.
En 1536, François 1er organise la fabrication des tissus de soie à Lyon, en utilisant des fils de soie toujours importés d’Italie étant donné que la France n’en produit pas suffisamment.
Enfin, vers 1564, sous le règne de Charles IX (1550-1574), un jardinier nîmois, François Traucat prend part à l’extension du mûrier à partir de ses pépinières ; plus de 4 millions de plants sont alors installés en région méridionale et plus spécialement dans le Gard.
Henri IV (1553-1610), lui aussi soucieux de diminuer les importations de soieries fort coûteuses, suit les conseils du contrôleur général du commerce Barthélemy de Laffemas (1545-1612) prônant la multiplication du mûrier en France afin de permettre une intensification de l’élevage du vers à soie ; le roi passe outre l’opposition de son ministre, Maximilien de Béthune, futur duc de Sully (1559-1641) qui, étant un protestant aux mœurs très austères, s’oppose au port des vêtements luxueux en soie.
Enfin arrive Olivier de Serres (1539-1619) : c’est le grand initiateur de la sériciculture en France.
Cet agronome huguenot, nommé en 1596 historiographe du roi Henri IV, se rend à Paris en novembre 1598 pour y régler la succession de son frère décédé ; il emmène dans ses bagages le manuscrit de son livre “Le Théâtre d’Agriculture et Ménage des Champs” dont Henri IV fait imprimer en novembre 1599 le chapitre XIV intitulé : “La cueillette de la soie par la nourriture des vers qui la font”. Dans ce texte, il est traité avec une grande précision des soins à donner aux mûriers : plantation, qualité du terrain où installer les “meurières” (en fait, les mûreraies), greffage, taille, fumure… tout est mentionné, jusqu’aux influences de la lune).
Et en 1601, le roi, pour montrer l’exemple aux propriétaires terriens, fait planter 2OOOO mûriers dans le Jardin des Tuileries.
En 16O2, il exige même que chaque paroisse possède une pépinière de mûriers ainsi qu’une magnanerie.
De son côté, Olivier de Serres, revenu dans son domaine du Pradel, s’emploie à distribuer gratuitement tout autour de lui des pieds de mûriers provenant de ses mûreraies ; il offre aussi des graines de bombyx ainsi qu’un traité de sériciculture.
L’industrie française de la soie démarre véritablement.
Colbert (1619-1683), ministre de Louis XIV, conscient de l’importance de la soierie en France, supprime les droits de douanes intérieurs entre les provinces et institue des droits protecteurs sur les importations aux frontières de France. Enfin, il décide que Lyon sera l’unique bureau de douane pour contrôler les soies et soieries.
À noter que du temps des dragonnades, l’intendant du Languedoc, Lamoignon de Basville (1648-1724) fait planter de nombreux mûriers blancs le long des chemins des Cévennes, afin que les soldats du roi profitent de leur ombre lors de leur déplacement. En seconde conséquence, les feuilles de ces arbres inciteront les autochtones à s’en servir pour propager la sériciculture.
Malheureusement en 1685, la Révocation de l’Édit de Nantes par Louis XIV, va provoquer l’exode de nombreux huguenots, artisans “soyeux” dans le Midi et à Lyon ; cette émigration qui va grandement profiter à la Hollande, à l’Allemagne, à la Suisse… !
Les gros dégâts causés par le terrible hiver de 1709 sur les cultures arboricoles ont quand même un côté bénéfique pour la sériciculture : les paysans des régions méridionales remplacent alors les châtaigniers et les oliviers gelés, par des mûriers résistant à des températures de -25°C. Devinant là, avec juste raison, une source de revenus non négligeable, ils transforment les dépendances de leurs mas en magnaneries pour y élever des vers à soie.
À son tour, Napoléon Ier encourage la sériciculture.
L’apogée de la soierie française se situe entre les années 1820 et 1850, favorisée par l’invention en 1804 du métier mécanique du Lyonnais Joseph Marie Jacquard (les fameux bistenclaques lyonnais, nom tiré du bruit qu’émettaient les métiers des canuts de la Croix Rousse à Lyon).
Enfin, les nouvelles techniques de teinture de la soie et surtout, vers 1850, l’inauguration du transport ferroviaire raccourcissant les distances et diminuant le prix du transport des marchandises, contribuent à cette hégémonie.
Une révolution économique
À partir de 1740 la culture du mûrier constitue la rente foncière la plus productive. On en plante partout.
On construit de nouvelles terrasses. Parallèlement on agrandit les mas pour y créer des magnaneries toujours plus grandes. Les paysages et l’habitat se transforment.
La sériciculture connaît son apogée vers 1850. L’économie vivrière axée sur le châtaignier s’est transformée en économie de marché autour de la soie qui a engendré une certaine aisance.
Avec le châtaignier ou notre arbre à pain, le mûrier blanc ou l’arbre d’or fait partie de notre patrimoine arboricole occitan. En Pays d’Oc, cet aubre d’aur est aussi nommé amorièr (ou même amourié).
Pourquoi l’appelle-t-on “arbre d’or” ?
Est-ce parce qu’en fin de saison, il se pare d’un feuillage de couleur mordorée, illuminant toute la campagne qui se “rouille” à ce moment-là ou est-ce parce qu’il permettait à nos aïeux de nourrir leurs vers à soie producteurs de cocons, source de compléments (en pièces d’or ?) à leurs maigres ressources agricoles ?
Chacun, selon son érudition ou sa sensibilité, optera pour l’étymologie qui lui convient.
En 1852, plus de 60 départements français produisaient des cocons mais plus de la moitié viennent des Cévennes. Les raisons sont multiples : – Les bonnes conditions climatiques pour le mûrier, – La région, très pauvre et sans agriculture intensive donne la possibilité de mettre tous les bras à disposition pendant la période de 30 à 35 jours nécessaire à l’élevage du ver à soie, – L’activité pouvant être réalisée au sein de la cellule familiale, ne nécessitant pas d’investissement important est source d’argent liquide.
Une activité industrielle en pays rural
La transformation des cocons en fil de soie a longtemps été une activité rurale, chaque producteur dévidant sa soie qu’il vendait à l’occasion des grandes foires (Alès, Beaucaire.).
C’est au tout début du XIXe siècle que le tirage du fil s’est industrialisé dans de grands ateliers aménagés dans les villages de fond de vallée, en bordure des cours d’eau. Ces nombreuses filatures à l’architecture caractéristique, comme les magnaneries bien reconnaissables, témoignent encore de cet âge d’or cévenol.
Dans nos contrées méridionales, le mûrier blanc passa longtemps pour un arbre mythique, à tel point qu’en maints endroits des Cévennes, lors de la cérémonie familiale du Cachio-Fio (ou de l’embrasement de la bûche), ayant lieu le soir de Noël, c’est une bûche de mûrier, mort dans l’année, qui était posée dans l’âtre par le benjamin de la famille. Ensuite le doyen l’aspergeait de vin blanc à l’aide d’un rameau d’olivier (autre arbre mythique pour nous) en prononçant ces mots :
“Que Diéu nos faga la gracia de veire l’an que ven ; é si siam pas dé maï, que noun siguen pas dé mens”, ce qui se traduit par “Que Dieu nous fasse la grâce de voir l’an qui vient ; et si nous ne sommes pas plus, que nous ne soyons pas moins”.
Les feuilles de mûrier, nous l’avons dit, servent à nourrir les vers à soie (1) ou chenilles du Bombyx mori (famille des Bombycidés), objet de la sériciculture.
Bien que les feuilles du mûrier noir (Morus niger L.) puissent être aussi fournies aux vers à soie, ces derniers préfèrent celles du mûrier blanc au duvet inexistant et surtout, bien moins coriaces pour leurs fragiles mandibules. Olivier de Serres, affirme même que la soie fabriquée par des vers nourris de feuilles de mûrier noir est “grossière, forte et pesante” mais qu’elle est “fine et légère” lorsqu’ils le sont avec des feuilles de mûrier blanc.
Au printemps, dès leur éclosion, les chenilles du bombyx, issues d’œufs ou “graines” font une énorme consommation des feuilles de mûrier blanc et cela, pendant les 4 premiers âges de leur vie qui dure 25 jours : il faut leur fournir, à raison de 3 à 4 fois par jour, une grande quantité de feuilles leur permettant d’acquérir jusqu’à 10 000 fois le poids de la graine dont ils sont issus.
Parvenus au cinquième âge, les vers, grimpés sur les rameaux de bruyère, mis à leur disposition dans les magnaneries, s’y accrochent et sécrètent par leurs glandes séricigènes, pendant 3 jours, un mince fil d’environ 1 OOO mètres avec lequel ils construisent un cocon dans lequel ils s’enferment pour se transformer en chrysalide.
Au bout de 10 jours, un papillon, classé parmi les papillons de nuit, sort du cocon en brisant les fils de soie. C’est ce papillon qui après accouplement va pondre des œufs ou graines permettant à l’espèce de passer l’hiver.
Ce fil, très ténu (1 gramme en contient environ 4000 mètres) c’est la soie qu’il faut récupérer intacte.
Donc, tuer le papillon avant qu’il ne quitte son cocon en coupant ce fil de soie, stoppe l’évolution du bombyx et constitue le début de l’industrie de la soie ou sériciculture.
La sériciculture a été longtemps l’objet de soins attentifs dans nos régions au point qu’on lui réservait beaucoup de mots techniques en occitan : ainsi, le dictionnaire languedocien-français de l’abbé Boissier de Sauvages paru en 1756 en recense pas moins d’une cinquantaine.
Actuellement subsistent encore : le magnan (ver à soie) élevé par le magnanier aidé par des dames ou des demoiselles, les magnanarelles, dans une magnanerie ou magnanière.
Le mûrier blanc est en général un arbre de taille moyenne (de 3 à 8 mètres de hauteur) recherchant la lumière. Il a besoin d’eau, surtout la première année, mais par la suite, l’étendue de son système radiculaire lui permet d’aller chercher cette eau assez profondément.
Son bois, prenant une teinte brune en vieillissant, est utilisé en tonnellerie (fabrication des douves), en menuiserie pour le charronnage (techniques de fabrication et de réparation des charrettes) et même en ébénisterie. Les tourneurs l’emploient pour imiter le buis dont il n’a cependant pas la grande dureté. L’écorce, amère et purgative est utilisée dans les pharmacopées traditionnelles comme vermifuge.
Ses feuilles caduques, alternes, ont une forme ovale plus ou moins dentelée.
Les feuilles du mûrier apparaissent en même temps que l’éclosion de la graine du ver à soie ; en cas d’intempérie, il faut retarder l’éclosion des graines en les maintenant au froid afin que l’éclosion concorde avec l’apparition des feuilles à récolter.
Cette récolte des feuilles suit des règles particulières comme l’écrit G. Bélèze en 1876.
Tout d’abord, il faut veiller à l’arbre lui-même : “La récolte des feuilles exige quelques précautions indispensables pour le bon entretien des arbres et aussi pour tirer de la quantité des feuilles dont on dispose, le meilleur parti possible. On doit dépouiller les arbres complètement ; s’il restait des feuilles aux extrémités de quelques branches, celles-ci attireraient trop fortement la sève, au détriment de la végétation du reste de la branche. Les arbres les plus jeunes doivent être dépouillés les premiers pour leur laisser le temps de refaire leur second feuillage et d’aoûter le jeune bois de leur seconde pousse. Il est d’ailleurs de l’intérêt du magnanier de réserver pour la fin de l’éducation la feuille des vieux arbres qui contient plus de principe résineux, et donne une meilleure soie.”
Ensuite, lors de la cueillette proprement dite, certaines précautions doivent être observées : “La cueillette ne doit commencer le matin que quand le soleil a dissipé la rosée ; elle doit cesser avant le coucher du soleil. On doit cueillir les feuilles en les tirant de bas en haut ; si on les tirait en sens contraire, elles se détacheraient plus aisément, mais on détruirait une partie des bourgeons placés dans leurs aisselles, et le jeune bois recouvrirait des écorchures qui compromettraient l’avenir des arbres. On emploie pour la cueillette, des sacs dont l’orifice est cousu à un cerceau de bois muni d’un crochet ; ces sacs, à mesure qu’ils sont pleins, sont vidés dans des charrettes pour les transporter des champs à la magnanerie. Pendant ce transport, on couvre la masse de feuilles de mûrier avec des branches de chêne, d’orme ou de châtaignier garnies de tout leur feuillage, afin de les préserver de l’action desséchante des rayons solaires”.
Vivant jusqu’à 3OO ans, le mûrier a une croissance assez rapide durant la première année mais elle tend à se ralentir par la suite ; cette croissance est nettement supérieure à celle de l’olivier ou celle du châtaignier. Si bien qu’on a coutume de dire dans le Midi : « Oliu dé tou gran païré, castanhié dé ton païre, amoriér dé tu » (Olivier de ton grand-père, châtaignier de ton père et mûrier de toi).
Les fleurs du mûrier ont un aspect verdâtre ; réunies en courts épis ou chatons, elles sont soit mâles soit femelles, portées sur le même pied car il s’agit d’une plante monoïque.
Le fruit ou mûre est une sorose, c’est-à-dire une sorte de fruit composé, formé d’un amas de carpelles charnus réunis sur un réceptacle central. Cette mûre, d’un goût assez fade, n’a aucune parenté, sinon de formation similaire, avec le fruit de la ronce, nommé aussi mûre.
À la différence du mûrier noir qui donne systématiquement des fruits violacés ou noirs, le mûrier blanc produit des fruits tantôt blancs, tantôt rosés, ou souvent d’un très beau noir.
Le mûrier blanc se présente sous diverses variétés correspondant à des plants mieux adaptés à un endroit qu’à un autre.
Dans nos régions et plus spécialement en Cévennes, les variétés les plus cultivées sont :
– la colombasse, à mûres blanches, dont les feuilles minces d’aspect très soyeux, ont l’avantage d’être ramassées facilement,
– la colombassette, à feuilles un peu plus petites, croissant surtout dans les vallées,
– la rébalaïro, à feuilles moins nombreuses, portant peu de fruits,
– la blanquéto, moins productif que la colombasse,
– l’amouro négro, à nombreuses mûres d’un beau noir,
– la roumaïno, assez répandu, aux grandes feuilles vert foncé,
– la lengo de biâ ou, proche de la colombasse, aux mûres pourpres,
– la boure éspès, nommé aussi tréflo.
Afin de perpétuer l’existence des variétés de mûriers, il y a actuellement de par le monde des conservatoires où sont entretenues des collections de variétés de mûrier sous forme de cultivars, résultant de divers croisements. En France, il existe trois conservatoires, situés dans l’île de Porquerolles, à Saint-Christol-les-Alès dans le Gard et à La Mulatière, près de Lyon.
Un déclin inéluctable
Succédant au châtaignier et nommé « l’arbre d’or des Cévennes » le mûrier a permis de passer d’une économie de subsistance à une économie de profit.
La production française est à son apogée autour de 1853 avec 26000 tonnes de cocons. En 1855 avec 5000 tonnes de soie grège, la production dépasse celle des royaumes lombards et vénitiens réunis.
Plus de 2300 communes pratiquaient la sériciculture, ce qui occupait environ 300.000 à 350.000 personnes.
Ces chiffres ne seront cependant plus jamais atteints car c’est à cette époque qu’une épidémie virulente va progressivement décimer les élevages de vers à soie et faire chuter la production de cocons : 7500 tonnes en 1856.
Pasteur est envoyé dans les Cévennes en 1865 par le ministère de l’Agriculture et met en place 4 ans plus tard une méthode pour sélectionner les œufs indemnes de maladie.
Cependant la guerre de 1870 ainsi que la concurrence liée à l’ouverture du canal de Suez en 1869 freinent la reprise de l’activité. En effet, l’existence du canal permet d’abaisser le coût du transport des soieries en provenance d’Extrême-Orient où la main d’oeuvre est peu onéreuse, faisant naître une concurrence défavorable à la sériciculture française.
En 1892, une prime proportionnelle au poids des cocons récoltés est mise en place mais reste insuffisante.
Enfin, le coup de grâce est asséné par la découverte et de l’exploitation de la soie artificielle, en 1884, par le comte Hilaire de Chardonnet (1839-1924) : traitant la cellulose, matière très courante composant la paille, le bois… par de l’acide nitrique, il obtint de la nitro-cellulose (ou fulmi-coton) laquelle, mêlée à de l’éthanol et de l’éther, conduit au collodion que l’on étire en un fil fin que l’on rend ininflammable par un bain dénitrifiant (appauvrissement en nitrates) de sulfures alcalins.
La loi du 8 juillet 1934 interdisant l’utilisation du terme de “soie artificielle”, remplacé par celui de “rayonne”, ne modifie en rien le déclin inexorable de la soie naturelle du bombyx et par répercussion, l’abandon de la culture du mûrier.
Cette descente aux enfers s’achève avec les guerres auxquelles participe la France, provoquant l’appauvrissement des milieux aisés, acheteurs habituels des riches vêtements de soie.
En conséquence, les mûreraies ne servant plus à rien sont laissées sans soins ce qui les livre à l’attaque de différentes maladies : la rouille, la gommose bacillaire, la maladie du rouge…
Un sursaut de relance de la sériciculture est tenté sous l’État Français (1941-1945) : une loi parue au J.O. du 4 février 1941 interdit, sans autorisation spéciale, l’abattage des mûriers dans 24 départements.
La triste fin de la sériciculture française se traduit vers 1950 par l’arrachage généralisé des plants de mûriers dans le Midi : ils sont remplacés par de la vigne, du maïs et des vergers, cultures bien plus rentables.Cependant, comme ailleurs, les crises successives secouent les Cévennes même si n’ayant pas vraiment d’activité de substitution,elles résistent mieux que les autres régions. Elles assurent 86 % de la production séricicole nationale en 1938 contre 51 % trente ans auparavant. La dernière filature française, Maison Rouge, sise à Saint-Jean-du-Gard, ferma ses portes en 1965.
En 1968, l’état suspend ses aides ce qui signe l’arrêt de mort de la sériciculture française.
En 1977, une relance de la sériciculture cévenole est tentée avec la création de l’A.D.S. Cévennes (Association pour le Développement de la Sériciculture en Cévennes). En 1978, l’A.D.S. Cévennes lance sa première campagne séricicole pour la production de cocons, à un niveau interdépartemental. Trente-six éducateurs de l’Hérault, du Gard, de la Lozère, de la Drôme et de l’Ardèche produisent cette année-là une tonne et demie de cocons. Puisque la soie grège produite en Cévennes est trop chère face aux soies importées de Chine, elle va créer en 1980 sa propre structure de consommation (la S.I.C.A. ou Société d’Intérêt Collectif Agricole Soie-Cévennes): elle transformera et commercialisera la production locale, maîtrisant ainsi la totalité de la chaîne soie, du mûrier au tissu. Cependant son activité restera faible face aux mastodontes asiatiques.
Ainsi finit l’aventure séricicole de la France.
Cependant, quelques essais ont été ou sont encore tentés pour la faire revivre mais ces soubresauts sont à ranger au coin des anecdotes.